Industrie
By Christian Balle
A cinquante ans, cet ingénieur de l'Ecole supérieure de physique-chimie de la Ville de Paris, titulaire d'un DEA d'électronique, a commencé sa carrière chez Renault avant de passer chez Alstom, au moment où la sécurité et la signalisation ferroviaire introduisaient l'électronique dans un univers où régnait l'électromécanique, puis de revenir chez Renault, dont il est aujourd'hui, au sein de la direction de la recherche, chef du département systèmes électroniques. Animateur de la thématique automobile et transports du pôle, il est donc particulièrement bien placé- il y a retrouvé plusieurs connaissances de son époque Alstom - pour mettre en valeur les sujets d'intérêt commun que peuvent avoir des industries apparemment aussi différentes que le ferroviaire et l'automobile, par exemple dans le cadre de recherches sur la gestion des flux. « Nous essayons de progresser ensemble sans, bien sûr, dévoiler tout ce que nous faisons », explique cet amateur de randonnées en montagne avec des copains de promo. Mais il croit beaucoup aussi à l'effet « réseau de réseaux ». Travailler avec des établissements de recherche, tels que le CEA ou l'Inria, en contact eux-mêmes avec différentes industries, facilite les échanges.
Joëlle Gauthier
Comme vice-président recherche et innovation d'Alcatel, Joëlle Gauthier règne depuis près de trois ans sur l'ensemble des centres de recherche dont dispose l'industriel français dans le monde, soit quelque 500 chercheurs. Le plus important de ces centres rassemble un peu plus de 200 personnes à Marcoussis, dans l'Essonne, au cœur du pôle, le reste des effectifs se répartissant en Allemagne, en Belgique, au Texas, au Canada et en Chine. Une fonction naturelle pour cette jeune femme dont la double formation - un diplôme d'ingénieur de l'Ecole nationale d'ingénieurs électriciens de Grenoble et un MBA à l'Essec - lui a permis d'occuper précédemment, toujours chez Alcatel, des fonctions de stratégie et de gérer des acquisitions au retour d'un séjour de quatre ans aux Etats-Unis. Elle y était en charge, pour la division entreprise de l'équipementier français, des produits réseaux locaux et du lancement de la téléphonie IP aux Etats-Unis. Avant de rejoindre Alcatel en 1994, Joëlle Gauthier avait travaillé pour la société américaine Network Equipement Technology dans le domaine des réseaux ATM et chez Hewlett Packard. Pour elle, les dossiers avancent davantage lorsqu'ils résultent de partenariats entre industriels que d'un quelconque réseau politique.
Luc Renouil
Responsable du développement défense et sécurité de Bertin, Luc Renouil, trente-cinq ans, X, Supaéro, a étudié aux Etats-Unis et a commencé sa carrière au ministère de la Défense, à la DGA, avant de passer au ministère des Finances et de se tourner vers la moyenne entreprise. Après une première expérience dans le privé, il entre chez Bertin en 2002 pour poursuivre la même logique de développeur et d'entrepreneur. Connaissant bien le fonctionnement des pouvoirs publics, il peut les aborder et tenter de les aider à décider. « Je pense que le réseau joue, mais que ce qui compte, c'est la vision qu'on a pu se forger de ce qu'il y a à faire et de la manière de travailler ensemble entre décideurs politiques, collectivités publiques, dirigeants dans les grands groupes et dans les PME. » S'il est capable de décrocher son téléphone pour organiser un déjeuner avec un ami qui travaille dans un ministère, il estime plus important « d'être cohérent dans la durée et les messages qu'on fait passer auprès de ces personnes, de trouver un positionnement et une vision commune ». Son ambition pour le pôle : « Faire travailler ensemble des labos, des start-up, des moyennes entreprises, toute la chaîne de la valeur du plus petit au plus gros, du plus amont au plus aval, avec une logique où chacun trouve sa place pour résoudre des problématiques de société et de marché. »
Dominique Vernay
Directeur recherche et technologie du groupe Thales, où il a effectué l'ensemble de sa carrière, Dominique Vernay assure parallèlement la présidence du pôle et celle d'Opticsvalley. Diplômé de l'Ecole supérieure d'électricité, il entre en 1973 chez Thales où il est tour à tour ingénieur, chercheur, chef de service puis directeur technique. En prenant en 1990 la responsabilité d'une activité du groupe dans les simulateurs, en France puis en Grande-Bretagne, il développe pendant sept ans son savoir-faire en management international tout en conservant « un intérêt fort pour la technique ». Cette vie renforce son goût pour les contacts internationaux et la collaboration, tant avec des partenaires que, parfois, avec des concurrents, persuadé qu'il « vaut mieux avoir 50 % d'un marché que 100 % de rien ». Arrivé dans cet état d'esprit à la direction technique de Thales pour renouveler les méthodes de recherche et de développement, il opte pour l'ouverture et la collaboration avec des centres de recherche et persuade le groupe de rebâtir le sien sur le campus de l'Ecole polytechnique, à Palaiseau. Opticsvalley constitue bien sûr sa tête de réseau, mais il l'alimente aussi grâce aux directeurs de recherche de l'industrie et du public, ainsi qu'aux politiques, qui apportent, à leur tour, leurs propres contacts.
Gérard Roucairol
A cinquante-huit ans, le directeur scientifique du groupe Bull ne compte pas sur des relais politiques ou associatifs pour faire avancer les projets du pôle. « Au cours des années, de par mes fonctions, j'ai acquis une vision assez large des acteurs nationaux, que ce soient les grands groupes ou les PME, les laboratoires universitaires. Ce sont plutôt ces leviers-là que j'utilise. » En quinze années de vie universitaire qui l'ont vu professeur à Paris-VI, à Paris Sud-Orsay, directeur du laboratoire de recherche d'Orsay, professeur à l'Ecole normale supérieure de la rue d'Ulm, l'homme a pu se forger de solides amitiés dans l'enseignement supérieur avant de rejoindre le groupe Bull fin 1984 pour s'occuper de la recherche centrale. « Je suis toujours resté en contact avec le monde de la recherche national et international. » Président pendant cinq ans du Réseau national des technologies logicielles (RNTL) destiné à soutenir l'innovation au niveau national, et aujourd'hui vice-président du programme Eureka ITEA sur le logiciel piloté par un ensemble d'industriels comme Nokia, Siemens, DaimlerChrysler, Bosch, Thales, Alcatel, Thomson, Bull, Italtel ou Barco, ce voyageur, amateur de peinture, est bien Industrie placé pour favoriser les regroupements entre les mondes académique et industriel.
Maurice Klein
Capable de suivre deux conversations à la fois tout en se consacrant entièrement à chacun de ses interlocuteurs, le directeur général d'Opticsvalley est le véritable homme-orchestre du pôle. Né en 1950 à Paris d'un père polonais et d'une mère grecque, l'homme revendique ses origines : « Chez moi, l'international, les marchés, la mutualisation des cultures sont des données de base. » Science po, du droit, un MBA à Harvard, un doctorat à Paris-VIIet « un peu d'expérience de la vie » - celle à laquelle il tient le plus - acquise, entre autres, aux Etats-Unis, où il a passé une dizaine d'années, dont quatre à la Banque mondiale avant d'être professeur à Boston puis de créer trois petites entreprises en Californie, lui ont permis de se forger des convictions. « On n'a jamais inventé quelque chose de mieux que l'entreprise pour produire de la richesse », mais il est aussi « très attaché à l'économie mixte (...), car le marché n'est pas parfait et des petites entreprises, surtout, ont besoin d'être aidées pour corriger quelques excès. » Maurice Klein est tout aussi « attaché au développement local » et à la transmission du savoir. Pour vivre ce « credo », sous-jacent dans l'organisation du pôle, il compte d'abord sur son entregent, et ensuite sur ses nombreuses relations.